La transparence n’est pas un concept qui va de soi pour les entreprises. Le capitalisme à la française, c’est la culture du secret, ce sont les « sociétés anonymes » et les comptes qu’on ne publie que parce qu’on y est obligé par la loi. En France, la société dans son ensemble a souvent cultivé une forme d’opacité. Nous n’hésitons pas longtemps lorsqu’il s’agit d’exhiber notre vie intime sur les réseaux sociaux, pour autant, il ne viendrait à personne l’idée de révéler publiquement le montant de son salaire sur Twitter. Il y a des choses qui se disent et d’autres qui ne se disent pas, notamment en ce qui concerne le pouvoir ou l’argent. La question du respect de notre vie privée est un pilier de notre conception de la liberté individuelle. En cela, nous sommes très différents des anglo-saxons et de leur héritage protestant qui les incline à ne rien cacher, comme si le simple fait de dissimuler une information pouvait les rendre suspects.

Le libéralisme économique est construit sur cette notion de transparence. Cette habitude de tout dire, de tout exhiber, d’être absolument transparent est profondément ancrée de l’autre côté de l’Atlantique. Le mensonge y est très mal considéré alors que chez nous il a longtemps été plus ou moins toléré. Mais les temps changent. Les Français aspirent à leur tour à davantage de transparence, au moins en ce qui concerne les relations qu’ils entretiennent avec les organisations. À l’heure de la globalisation et de la massification de l’information, les entreprises françaises ne peuvent plus fonctionner comme autrefois sans prendre le risque de déplaire à leurs clients ou à leurs collaborateurs.

Cette nécessité pour l’entreprise d’être plus transparente est d’autant plus pressante qu’elle soufre d’un désamour chronique de la part de nos concitoyens. De nombreux scandales financiers, sanitaires ou environnementaux ont abîmé la relation entre entreprises et consommateurs. Lait infantile contaminé, Dieselgate, Paradise Papers, Levothyrox : une nouvelle affaire sort chaque mois en asseyant à chaque fois un peu plus l’idée que les entreprises se moquent de notre santé ou de nos droits quand il s’agît de faire du profit. Aucun secteur n’est épargné, le scandale Cambridge Analytica prouve que même une entreprise phare de l’économie numérique n’est pas à l’abri de voir éclater aux grands jours ses mauvaises pratiques. En dehors des questions d’image, ces scandales à répétition sont également très mauvais pour le chiffre d’affaires des entreprises prises la main dans le sac.

 

confiance

Les consommateurs sont étroitement liés les uns aux autres

Internet est passé par là, les consommateurs sont étroitement connectés les uns aux autres, l’information circule et se répand à une vitesse vertigineuse. Il est de plus en plus aisé de lancer des pétitions, de convoquer les médias ou de rejoindre des actions de masse devant les tribunaux. Relayés par les réseaux sociaux, les appels au boycott citoyen sont de plus en plus efficaces. Gare donc aux entreprises qui ne jouent pas le jeu de la transparence. Derrière ce phénomène, il y a surtout une revendication des consommateurs au droit de savoir. Il est apparu dans une récente enquête d’opinion que ce que les usagers reprochent le plus à la SNCF, ce n’est pas tant la vétusté du réseau ou les grèves à répétition, c’est surtout le manque d’information.

De manière générale, davantage qu’une transparence absolue, les consommateurs réclament surtout un droit à l’information. Pour se reconnecter avec leurs clients et regagner leur confiance, l’entreprise doit faire de la pédagogie, établir un dialogue, expliquer ce qu’elle fait et comment elle le fait. Du côté des employés, le constat n’est pas plus reluisant. Il est rare qu’on voue une passion à son entreprise. Beaucoup de salariés ont le sentiment d’être bridés dans leur créativité et d’être cantonnés à des tâches répétitives. Pas assez informés, ils éprouvent des difficultés à comprendre ce que leur hiérarchie attend d’eux. Le malaise au travail est réel et touche aussi de nombreux cadres qui disent parfois se sentir piégés dans des organisations complexes et verticales qui leur laissent peu de liberté. Laissés à l’écart des prises de décision stratégiques, ils ont souvent l’impression d’être mal considérés par leur direction. Et que dire des jeunes actifs de la génération Y qui peinent à trouver leur place dans un monde du travail dont ils ne comprennent pas les codes. La transparence, les entreprises la doivent à leurs clients pour regagner leur confiance mais aussi à leurs collaborateurs pour qu’ils retrouvent du sens à leur travail.

Attention néanmoins aux effets de manches, la transparence ne peut pas n’être qu’un discours. Notre époque exige de la sincérité, mais il est difficile d’être sincère quand on a des choses à cacher. Être transparent implique une transformation globale de l’entreprise. Elle doit se mettre au diapason de la société et intégrer ses nouvelles références morales. Les attentes des consommateurs ont évolué. Pour continuer à y répondre, les entreprises doivent changer de paradigme, à commencer par adopter les principes d’une bonne gouvernance, à savoir, selon l’OCDE, contribuer à renforcer la démocratie et les Droits de l’Homme, promouvoir la prospérité et la cohésion sociale, réduire la pauvreté, soutenir la protection de l’environnement et renforcer la confiance publique envers l’État, rien que ça. 

En définitive, les entreprises ne peuvent plus se comporter comme des organisations à vocation uniquement économique mais aussi comme des objets politiques. Leur rôle sociétal a changé. Pour regagner la confiance des consommateurs, l’entreprise doit faire sa mue et se mettre à nu. Ramené à la question des ressources humaines, le principe de transparence se lie facilement au concept d’entreprise libérée, une philosophie qui propose de remettre l’humain au cœur de l’entreprise pour améliorer le bien-être au travail et la productivité des salariés. 

Concrètement, une entreprise libérée c’est une entreprise qui abolit ou réduit fortement les rapports hiérarchiques, qui responsabilise ses salariés, les implique dans le processus de décision et les laisse se fixer leurs propres objectifs. À la clef, des collaborateurs plus heureux, plus motivés et plus intéressés par le succès de leur entreprise. Ce mode de management ne peut s’épanouir que si règne un climat de confiance entre les salariés et entre les salariés et leur direction. Il implique d’encourager la libre circulation de l’information au sein de l’entreprise. Le système de rémunération et de gestion des carrières, par exemple, doit être connu, compris et accepté de tous alors qu’il est trop souvent nimbé de mystères. Pour donner le meilleur d’eux-mêmes, les salariés ont besoin de connaître les règles du jeu. Il ne peut pas y avoir d’entreprise libérée sans transparence. 

Ne rien cacher, ce n’est pas non plus tout dire. L’entreprise a le droit d’avoir une vie privée, ne serait-ce que pour protéger ses petits secrets de fabrication. Les consommateurs n’exigent d’ailleurs pas d’elle qu’elle dévoile tout, mais simplement qu’elle soit sincère, qu’elle ne cherche pas à dissimuler des pratiques contraires aux principes d’une bonne gouvernance. Si elle déroge à cette exigence, la sanction est immédiate. Le sentiment d’être dupé est beaucoup plus insupportable qu’auparavant.

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La transparence ne peut pas être qu'un discours

Aujourd’hui, au moindre écart, les dirigeants d’entreprise doivent faire acte de contrition pour sauvegarder leur réputation et celle de leur marque. Le mea culpa de Mark Zuckerberg devant le Sénat américain puis devant le Parlement européen aurait été encore impensable il y a quelques années. Si l’homme au sweat à capuche le plus célèbre du monde s’y est plié, malgré son aversion pour ce type d’exercice, c’est bien que la survie même de son entreprise était menacée. Le tribunal médiatique et populaire est impitoyable. En cas de scandale, aucune entreprise n’est à l’abri du naufrage. Entre les lanceurs d’alerte, les journalistes d’investigation et ces millions d’enquêteurs anonymes armés de leur Smartphone que nous sommes tous, tout finit par se savoir. Dans ce contexte, la transparence n’est pas une option pour l’entreprise. Sans compter que l’absence d’information, ou l’incapacité à y accéder, engendre souvent un sentiment d’impuissance, de méfiance et de frustration qui instille le doute chez le consommateur. Il en va de même pour les collaborateurs. Si une entreprise éprouve des difficultés, elle a tout à gagner à s’en ouvrir à ses salariés. 

Dans une époque où réussir à conserver un secret tient du miracle, on pourrait cyniquement penser la transparence comme un mal nécessaire. On aurait pourtant tort de la considérer uniquement comme une contrainte. La transparence est pour l’entreprise une formidable opportunité de nouer une relation de confiance durable avec ses clients. Elle facilite aussi l’instauration de nouveaux rapports entre dirigeants et salariés afin de contribuer pleinement à libérer l’entreprise de ces vieux carcans.

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